Resistenza Moves : L’Islande en vélo et en argentique

Temps de lecture: 25 min

Resistenza MovesIl y a quelques années, je bossais comme animateur jeunesse à la MJC de Briançon. J’avais créé des séjours « Road Trip Skate » : deux anim’, deux camions, une douzaine de jeunes et roule ! Zique à fond, bonnes énergies et grosse motiv’, on partait pour quelques jours à la recherche des meilleurs skate parks de notre route.
Sur l’un de ces séjours j’avais « embauché » ‘Toine, skater de talent, pour donner quelques conseils techniques aux jeunes skaters. ‘Toine m’avait dit « j’ai un pote qui fait de supers photos, ce serait chouette qu’il nous accompagne sur le Road trip ». Il me restait un peu de place, j’ai donc dit « ok, va pour le pote ! ». C’était la première fois que je rencontrais Luka. Il est arrivé avec tout un tas de matos : boîtiers, objectifs et autres flashs. Il a fait un nombre impressionnant de clichés sur la sortie : yes ! …belles images en perspective !
J’ai été surpris de le retrouver quelques jours plus tard avec le CD des photos du séjour accompagné… d’un contrat de cession d’images en bonne et due forme ! Jeune, mais déjà très organisé.
Le bac en poche, il part ensuite faire ses études sur Paris, nous sommes restés en contact via les réseaux sociaux.
Quelques temps plus tard, Luka, majeur depuis peu, est repassé à la MJC pour me demander quelques conseils pour son tour d’Islande en vélo pour y faire des photos en argentique. J’ai le souvenir de m’être dit : voilà un jeune bien déjà très pro, qui a de chouettes projets. Ça fait plaisir à voir ! Je sentais venir la belle expérience, avec une dimension photo originale, surtout à l’heure du tout numérique !
La suite ? Vous allez maintenant la découvrir…
Et attention, la valeur n’attendant pas le nombre des années, retenez bien son nom car vu son potentiel et sa détermination, je pense qu’il ira loin… En vélo ou pas !

Yoh

© Luka Leroy

© Luka Leroy

 

Interview :

 

— Salut Luka, peux-tu te présenter ?

Houlà, vaste question… Je vais tenter de ne pas m'éparpiller. J'ai donc 20 ans, je suis originaire des Hautes-Alpes, de Briançon plus précisément. J'y ai passé mes jeunes années (ça y est, je parle déjà comme un vieux !), j'ai grandi dans cet environnement ; dès que j'ai su tenir debout, on m'a mis sur des skis et quand j'ai su marcher, on m'a accroché à un rocher. J'ai toujours adoré le sport, depuis que je suis petit je fais du judo, du ski bien sûr, de la montagne... J'ai également fait de l'escalade et de la planche à voile, mais bon c'est pas très important. Je suis passionné de photographie. Quand j'étais tout petit, je voulais faire «musicien-pelleteuse» mais j'ai légèrement changé d'avis et maintenant c'est plus photographe-voyageur. J'ai fait mon lycée à Briançon aussi et j'y ai passé un Bac S option Sciences de l'ingénieur et option italien (que j'ai eu avec mention d'ailleurs !).
Du coup, ça m'a permis d'entrer dans un BTS Photographie à Paris, l'une des seules formations publiques en France. Après ce BTS j'ai passé le concours pour rentrer à l’École Nationale Supérieure Louis Lumière où je suis actuellement en première année. Mais parlons plutôt de voyage, on est quand même là pour ça !

Depuis tout petit mes parents m'ont emmené partout ! Aux Açores, au Cap Vert, au Maroc, en Italie et m'ont donné le bien connu virus du voyage. C'est pendant l'été 2008, lors d'un voyage en Martinique que j'ai découvert la photographie. J'ai pris le petit appareil photo compact numérique de mes parents et contre leurs recommandations j'ai commencé à « tout dérégler ». Je ne comprenais rien au début, vraiment rien, j'ai alors lu la notice de l'appareil, ce qui a constitué mon premier cours de photographie…

© Luka Leroy

© Luka Leroy

À mon retour en France, je me suis acheté mon propre appareil, un reflex numérique tout neuf que j'ai commencé à utiliser de partout, que ce soit pour photographier l'intérieur de mon frigo ou pour faire des photos de skate avec mes potes. Mais j'avais surtout envie de faire des photos de voyage. J'avais du remord par rapport aux photos ratées de Martinique et je voulais me rattraper avec un autre voyage.
Coup de chance, été 2009, je pars 1 mois en voyage en Australie avec mon père, un voyage pendant lequel je passe mes journées à faire des photos, plus de temps derrière mon appareil qu'à regarder le paysage.

 
© Luka Leroy

© Luka Leroy

À mon retour, pas le temps de souffler, je repars pour un voyage de 3 mois au Canada, tout seul cette fois ; un échange scolaire que j'avais organisé l'année précédente. Je me retrouve intégré dans une famille canadienne anglophone, à aller à l'école à Toronto, avoir des cours de photographie et de laboratoire photo noir et blanc mais aussi à aller à la messe tous les dimanches matin à 8 heures… toujours en compagnie de mon appareil. Au retour en France, j'étais super content, la tête (et l'appareil) remplis de souvenirs. J'avais envie de repartir.

J'ai fait un premier voyage vraiment tout seul en Angleterre deux semaines, où je suis parti rejoindre des connaissances. Je pensais me balader tout seul sur les routes anglaises, mais au final j'ai été « forcé » de rester avec mes hôtes. J'ai été très déçu de ce séjour où je n'étais pas libre de partir à l'aventure. Il faut dire qu'à 16 ans, je n'étais peut-être pas encore totalement autonome…

 

 

— Comment t’est venue l’idée de ce projet ?

À 19 ans j'étais un peu plus autonome. En 2012, alors que je ne savais pas encore ce que je ferai l'été suivant, mon père m'a envoyé une information concernant la bourse de voyage Zellidja, c'est un organisme qui aide financièrement les jeunes lorsqu'ils partent en voyage. On nous demande de monter un projet, faire une enquête sur place et présenter des résultats à l'organisation au retour. J'étais emballé, j'ai vite monté un projet que je devais rendre quelques jours plus tard, j'y ai passé des nuits blanches !
Avant tout ça, j'avais vaguement évoqué l'idée de partir en Islande avec une amie. J'ai foncé dans cette direction, je voulais partir faire le tour de l'Islande pour faire des photos avec un vieil appareil argentique. Et puis, autant le faire à vélo ! Mais la bourse imposait d'être tout seul. C'est pas grave, je partirai tout seul. J'avais discuté avec des amis qui m'avaient affirmé que la bourse était facile à obtenir, tant que le projet présenté était cohérent. J'étais tellement enthousiaste que, en voyant le prix des billets d'avion sur internet j'avais craqué, j'avais acheté mes billets aller/retour. C'était sur, je partais 1 mois et demi en Islande cet été !
C'est quelques jours plus tard, en recevant la réponse négative de Zellidja que je me suis posé des questions…
Je ne pouvais et ne voulais plus renoncer à ce projet qui prenait forme dans ma tête. J'ai donc cherché d'autres moyens de financer mon voyage. Dans un premier temps, j'ai cherché des sponsors. Au niveau des marques de vélo, de matériel de voyage, j'ai envoyé des mails partout et je n'ai eu aucune réponse. Je commençais a me dire que mon projet n'était pas bien et à me remettre en question…
C'est en cherchant sur internet que j'ai découvert le [tooltip style="light" shadow="yes" rounded="yes" content="Financement Participatif"]crowdfounding[/tooltip], j'ai donc mis mon projet sur un de ces sites (Ulule.com pour ne pas faire de pub), en demandant le même montant que j'avais demandé à Zellidja.
Et finalement ça a marché ! Avec l'aide des personnes de mon entourage, j'ai réussi a atteindre mon but. J'étais content, j'avais retrouvé goût à mon projet, il intéressait des gens qui m'avaient donné leur soutien ! Après ça, j'ai même trouvé des sponsors qui étaient emballés et m'ont aidé financièrement.
Quelques mois plus tard j'étais sur mon vélo. Je me revois encore hurler, devenir fou contre ce vent qui m'empêchait d'avancer, jusqu'à en pleurer. Mais avec un peu de recul, je peux affirmer aujourd'hui que ça a été la plus belle expérience de ma vie.

© Luka Leroy

© Luka Leroy

 

— Tu étais tout jeune au moment du départ, est-ce que cela a été un atout ou une difficulté ?

C'est vrai, j'étais plutôt jeune quand je suis parti. Mais j'avais déjà l'expérience de mes voyages passés qui m'a beaucoup aidé, même si je n'étais jamais tout seul, j'ai assimilé des modes de fonctionnement qui m'ont bien aidé pour ce voyage.
Si mon âge a été un atout, c'est bien au moment de monter le projet, je n'arrêtais pas de dire que je n'avais que 19 ans et que je m'apprêtais à faire le tour de l'Islande, seul et à vélo. Mais apparemment, je n'étais pas assez jeune pour étonner les gens ! haha
Si, en réalité au tout début du voyage je m'étais renseigné sur les moyens de transport pour ce voyage. J'étais trop jeune pour louer une voiture… Et ce n'est pas plus mal, si j'avais fait ce voyage en voiture, il n'aurait eu aucun intérêt (je vous avoue qu'à certains moments, je n'aurai pas craché sur une petite place bien au chaud à l'arrière d'un 4x4 bien confortable).

Je ne pense pas qu'être trop jeune ai été une difficulté. Mentalement, ça a été difficile, mais l'insouciance de l'âge m'a permis de faire des choses que je n'aurais pas faites si j'avais été plus mature… J'ai peut-être pris des risques, inconscients sûrement, mais c'est aussi ça qui a fait mon voyage.

© Luka Leroy

© Luka Leroy

Je me rappelle encore partir pour Landmannalaugar, un coin isolé en montagne, un matin en me disant que j'y serai le soir. C'est après avoir passé 3 jours de vélo sous la pluie battante, à parcourir 72 km de chemins caillouteux et sinueux et traverser une bonne dizaine de rivières avec mon vélo et tout mon matériel sur les épaules, que je suis enfin arrivé au camp, exténué. C'est à ce moment là qu'on m'annonce que la plus grosse dépression enregistrée depuis 60 ans arrive sur la région et qu'il vaudrait mieux repartir avant la tempête… Il était hors de question que je fasse le chemin à l'envers. J'ai donc planté ma tente et mis un paquet de pierres à la base pour affronter la tempête. J'ai été réveillé dans la nuit par la toile de ma tente qui me claquai sur la joue, avec 5cm d'eau à l'intérieur. Je ne me suis pas rendormi, j'ai prié pour que les arceaux de la tente ne cassent pas.

Bien entendu peut être qu'avec plus d'expérience, j'aurais mieux fait les choses, mais je ne me pose pas tellement la question, elles se sont faites comme ça.

 

— Ton projet a deux dimensions distinctes : une physique et sportive, celle d’une itinérance au long cours en vélo et une dimension artistique autour d’un projet photo bien particulier, quel regard portes-tu sur ces deux dimensions ?

Comme j'en ai déjà parlé juste avant, depuis tout jeune je fais beaucoup de sport. Je ne pourrais pas me passer du plaisir de faire du ski ou de me dépenser lot d'un combat de judo. C'était donc à la fois un plaisir et un défi de me lancer dans cette aventure à vélo. Il y avait aussi cette dimension d'« expédition », plus que le sport, c'était une difficulté technique de faire ce voyage avec mes moyens, j'aurais sûrement pu ramener des photos beaucoup plus belles si j'avais fait le tour de l'Islande avec un moyen motorisé, même si ces photos restent simples, je sais quels efforts ont été fournis pour obtenir ce résultat, et pour moi c'est ça qui fait leur valeur !

Pour ce qui est de la dimension artistique, ce n'est pas mon point fort. Du moins depuis tout petit j'ai tendance à préférer le sport au dessin ou à la musique…
Mais je ne suis pas assez bon pour vivre du sport et c'est sûrement pour cette raison que je suis photographe sportif.
Je me suis retrouvé à l'hôpital, un hiver suite à un accident de ski. Impossible de faire de sport avant plusieurs mois… Je devais trouver quelque chose à faire. C'est à ce moment là que j'ai pris la décision de devenir photographe, que j'ai compris que je pouvais rassembler ma passion pour le sport avec ma passion pour la photographie. Quelques mois plus tard, alors que je n'avais pas repris le sport, j'étais déjà sur les skis avec mon appareil photo. Au moins, je retrouvais les sensations et le plaisir du ski à travers la photographie. Depuis ce jour je fais tout pour lier le sport et la photo, lier ces deux dimensions ; physique et artistique que tu différencies.

 

— L’Islande a la réputation d’une nature sauvage et exigeante, d’une météo très aléatoire même en été, qu’est-ce qui a porté ton choix sur ce pays ?

Je crois que j'y ai déjà un peu répondu ; quand j'ai commencé à monter ce projet c'est parce que juste avant on avait discuté de l'Islande, avec une amie. Si on avait parlé du Japon, je serais sûrement parti au Japon ! Non, plus sérieusement, je pense que c'est bien de préparer un voyage du mieux qu'on peut, mais je pense aussi que c'est une bonne chose que de partir juste sur une idée qui germe dans nos tête, en se laissant découvrir des choses lors du voyage et en se laissant surprendre (dans le bon ou mauvais sens ). Et la météo n'est même pas entrée en compte lors de mon choix, quelle inconscience ! haha

 — L’aspect non-motorisé de ton itinérance était-il important pour toi ?

Au début pas du tout, j'ai plus choisi ça par commodité. Et plus j'avançais dans la préparation de mon projet plus je me rendais compte de l'importance qu'il fallait y accorder. J'ai vite compris que ce n'était pas un moyen de transport comme les autres, mais qu'un trip à vélo se réfléchit essentiellement autour du moyen de transport. Je n'était pas habitué au vélo, et pour tout vous dire je n'avais jamais vraiment fait de vélo, j'étais content de pouvoir découvrir une nouvelle manière de voyager. Il faut savoir qu'aujourd'hui la majorité de mes déplacements s'effectuent à vélo. Que ce soit pour aller à l'école tous les jours, aller faire les courses ou faire une balade dans Paris.

Le vélo, c'est aussi un état d'esprit, c'est ce déplacer grâce à notre propre énergie, sans produire aucune pollution. Quand je voyais les gros 4x4 me doubler à fond sans même faire attention ou bien quand les conditions climatiques étaient difficiles, je disais dans ma tête : « C'est toi et seulement toi qui l'aura fait, avec tes propres moyens, sans aucune aide, alors continue de pédaler ! »

 

— La nuit qui ne tombe quasiment pas en été, tu l’as vécue comment ?

Très bien ! Le premier soir j'ai été un peu étonné, je n'ai pas vu l'heure passer et je ne comprenais pas pourquoi il faisait toujours jour. Après minuit j'ai compris que la nuit ne tomberait pas et je suis allé me coucher. Les nuits suivantes, j'avais dépensé tellement d'énergie dans la journée que je m'endormais très rapidement, la luminosité ambiante ne me posait aucun soucis pour dormir. C'était même un avantage le soir, ça m'évitait d'utiliser ma lampe frontale pour me préparer à manger. Ça me rappelle un des meilleurs moments de ce voyage : j'avais passé un col dans la journée pour rejoindre un fjord isolé dans l'après midi. Pour gagner du temps sur mon parcours j'avais décidé de repasser le col avant le soir. En remontant le col, le brouillard était tombé et je me retrouvais dans la brume dense, je n'y voyais pas grand chose. Vers 23 heures, après quelques heures de montée j'arrivais au sommet du col, j'ai alors assisté à un spectacle magnifique. Le vent qui venait de face avait tourné et était maintenant dans mon dos. Il avait poussé les nuages et la brume se dissipait… Je roulais au milieu de la route vide, avec face à moi un ciel magnifique qui virait du rouge dense au bleu foncé. Il faisait bon, je me sentais bien, je me sentais libre !

© Luka Leroy

© Luka Leroy

 

— T’es-tu entrainé, physiquement ? …et à l’argentique ?

Tu vas rire, j'ai fait deux petites randonnées de 50km avant mon départ, avec tout mon matériel. Ça a été mon seul entraînement. C'était plutôt éprouvant et ça ne me rassura pas vraiment quand je me disais que je devrai faire ça tous les jours. Mais je n'avais plus le choix, il fallait y aller. Arrivé sur place, je ne pouvais plus reculer, il fallait avancer et finalement j'ai pris le rythme, malgré une première semaine très difficile physiquement.

L'argentique, oui je connaissais bien, même si j'ai commencé la photo avec le numérique, je me suis rapidement tourné vers les vielles pellicules qui m'obligeaient à fonctionner différemment, à réfléchir avant de faire une photo. Maintenant, je travaille la plupart du temps en argentique et je réserve le numérique pour les reportages photos qui ont besoin d'être publiés le soir même. Mais l'apprentissage de la photographie est long et j'ai encore beaucoup à apprendre, plus j'avance et j’apprends plus je me rends compte de mes erreurs. Mais c'est comme ça que ça s'est passé et au final ça s'est pas si mal passé.

— Tu étais en autonomie sur de longues périodes ?

Au maximum 4 - 5 jours, je m'arrêtais dans les villes pour acheter des provisions pour les jours qui suivaient. Et mes bagages ne me permettaient pas de prendre plus de nourriture. J'aurais pu acheter de la nourriture en poudre ou seulement des pâtes pour limiter le poids, mais j'ai bien vu que ce n'était pas nécessaire, que je trouvais souvent de quoi me nourrir sur la route. Si j'étais rentré à l'intérieur des terres, là, ça aurait été différent, il y avait moins de possibilités, mais le vélo ne me permettait pas ce type d'aventure.

 

— L'Islande, à tes yeux, c'est comment ?

Voila une question que j'attendais particulièrement ! Vous avez sûrement vu des photos d'Islande, tapez donc ça sur Google Images, vous trouverez de somptueux paysages déserts, où la nature est resplendissante et l'environnement semble magique. Ça vous donne envie de partir non ? Vous imaginez des lumières de folie aussi ? Parfait ! Et bien maintenant pensez aux 300 personnes qui se disent ça à la même seconde que vous ? Et quand, comme vous et moi, ils voient que le billet d'avion Orly-Keflavik est à 400€ aller-retour, vous imaginez aussi leur réaction. Voilà vous avez compris.

À la sortie de l'avion, la première choses que je me suis dit c'est « waouh on se croirait sur la lune ! » et la deuxième « waouh on se croirait à Disney-land ! ». Les cars attendent les touristes pour les emmener dans leur hôtel à la capitale, d'où ils vont booker un tour de l'île en passant par les sites les plus connus du coin. Je vous laisse imaginer que ces personnes ne sont pas capables de faire du camping sauvage (qui est totalement libre là-bas) mais qu'elles vont s'affaler dans les hôtels, qui sont déjà tous complets à cette époque.
Il faut savoir que le tourisme est la source principale de revenus en Islande, que le tourisme est essentiellement une activité d'été et que la population de l'île triple pendant cette période.
Je vous ai fait un peu le topo de la situation, ce qui en résulte, c'est les quantités impressionnantes de 4x4 et de cars sur la route et une multitude de touristes affamés à chaque point d'intérêt. Ça ressemble vraiment à une fête foraine, avec les clients qui vont d'attraction en attraction. Prêts à consommer de la nature.
J'ai vite compris, si vous ne voyez personne sur les photos d'internet, c'est parce que tout le monde se place sur la même ligne pour avoir la même photo, celle d'internet. Quel intérêt ? J'ai très vite commencé à chercher autre chose. Chercher justement les endroits sans personne.
Je ne veux pas non plus vous alarmer avec ma vision péjorative de l'Islande, qui est tout de même une terre extraordinaire et vraiment magnifique. Si je peux vous donner un conseil, évitez d'y partir l'été et dans les itinéraires connus si vous voulez être tranquille. Partez à l'aventure, cette terre est faite pour ça !

© Luka Leroy

© Luka Leroy

 

— Quels sont tes autres projets, de voyages, artistiques, sportifs ?

J'ai pour l'instant deux projets en tête: un voyage au Japon, aux origines de l'art martial que je pratique depuis 15 ans maintenant et une expédition à ski de randonnée en Amérique du Sud.
J'ai mille autres petits projets qui mêlent photo, sport ou voyage… Chaque jour j'ai de nouvelles idées. Mais je pense que c'est en faisant aboutir toutes ces petites idées que j'arriverai un jour à vivre de la photographie.

 

— Batteries et chargeurs ?

© Luka Leroy

© Luka Leroy

C'est un des avantages de l'argentique, aucune batterie pour mon appareil photo. J'ai acheté une pile de 1,5 volts avant le voyage et je n'ai pas eu besoin de la changer !

J'avais pris un iPod-Touch pour pouvoir donner des nouvelles de temps en temps (à ma maman qui était quand même inquiète) et je le rechargeais avec un petit chargeur solaire de temps en temps, ça suffisait tout juste pour passer quelques minutes sur internet quand je trouvais du wifi…

 

— Nuit chez l’habitant ?

J'ai dormi une seule nuit chez l'habitant ! A mon arrivée en Islande, je suis allé à Reykjavik, la capitale, où j'ai cherché un hébergement. J'ai fait des demandes sur le site couchsurfing et c'est au dernier moment, in extremis qu'une personne m'a accepté chez elle. C'était un homme qui vivait dans un appartement en banlieue, sa description était un peu étrange, il me demandait de m'inscrire sur un calendrier car apparemment chez lui il y avait tout le temps des couchsurfers (il parlait aussi de sa petite amie qui était de temps en temps chez lui et qu'ils entretenaient une relation libre. Il expliquait qu'on pouvait la draguer si on voulais ça ne le dérangeait pas, et pareil pour les filles avec lui, un truc vraiment bizarre je vous dis…). J'ai vu qu'il était photographe et je me suis dit qu'on aurait un sujet de conversation…
Quand je suis arrivé, il y avait trois autres couchsurfeuses qui dormaient chez lui, il nous a expliqué que c'était les invités qui faisaient à manger et devaient laisser un truc dans le frigo en repartant.
J'ai vite compris son système : il accueille pleins de voyageurs pendant tout l'été, ça lui permet de ne pas faire de courses du tout et ça fait aussi office de site de rencontres…
Bref, il nous a raconté sa vie toute la soirée, n'a pas voulu parler de photo car « on ne mélange pas le travail et la vie privée » ?!?! et j'ai dû attendre qu'ils aient fini de papoter pour me coucher et dormir sur le canapé, dans mon duvet. Après m'être fait réveillé à 6h car « il allait nager », je suis vite parti, en abandonnant contre mon gré un fromage que je venais d'acheter (le seul d'ailleurs $$$).

Sinon, malgré plusieurs essais, je n'ai pas pu dormir chez l'habitant : pas de couchsurfing ailleurs qu'à la capitale et dès que l'on parle anglais, on est considéré comme touriste. Qui dit touriste... dit argent...

 

— Galères ?

Au niveau du vélo j'ai à la fois eu de la chance et à la fois pas eu de chance. Il faut dire que je faisais très attention à mon vélo, je l'examinais et le nettoyais chaque jour. Pendant tout mon trip, je n'ai pas crevé une seule fois, j'ai eu une seule casse. C'est un rayon de la roue arrière qui a cassé, coté dérailleur. Dans ma préparation, j'avais tout prévu sauf un outil, que je trouvais trop gros et trop lourd. Le seul dont j'aurais eu besoin maintenant ! J'ai passé des heures à essayer de démonter la roue-libre et les pignons arrières avec ma chaine. Alors que je m'acharnais sous la pluie et la tempête qui étaient venues me rejoindre, une garde forestière s'est arrêtée et m'a amené jusqu'à la ville suivante dans son 4x4 pour réparer mon vélo. Coup de chance dans mon malheur.
À part ça, quelques tempêtes, des problèmes de manque de nourriture… mais rien de grave. Aucune chute, aucune blessure.
Un livre que je vous conseille si vous voulez voyager à vélo « Manuel du Voyage à Vélo » par l'asso' Cyclo-camping Internationnal. Très intéressant et très complet !

 

— Moments magiques ?

Je peux pas tous vous les raconter sinon j'écrirais un bouquin ! Je vous laisse rêver un peu ! D'ailleurs, si vous voulez lire mon livre, qui s'appelle : « Un, l'Islande en argentique », contactez-moi, je vous ferai une petite ristourne ! ;)

© Luka Leroy

© Luka Leroy

 

— Les expos ? Le retour ?

Quelques jours après mon retour, j'ai développé mes films moi-même. C'était aussi la première fois, et finalement ça a bien marché, j'ai raté un film sur la vingtaine que j'avais. J'ai ensuite scanné les images que j'ai retouchées –par « retouchées », j'entends : supprimer les poussières qui étaient venues se mettre sur la pellicule pendant le scan et essayer de retrouver les couleurs qu'il y avait sur les films. Aucune « retouche réelle », qu'on soit d'accord !
Après tout ça, j'ai imprimé des exemplaires A4 de mes photos que je suis allé présenter partout, chez des sponsors, chez des exposants. Là, bien sûr, tout le monde était emballé, le travail était déjà fait ! Bon je ne vais pas cracher sur les personnes qui m'ont aidé, j'ai eu des sponsors qui m'ont financé une grand partie de mon exposition, j'ai trouvé des exposants et j'ai présenté mes images pendant une année entière dans plusieurs lieux dans le Briançonnais, la région d'où je suis originaire.
Après ça, lors d'une conversation, j'ai affirmé que je participerai à un festival du livre, le lendemain je validais ma candidature. Au début, dans mon projet j'indiquais que je produirais un livre de ce voyage, il ne me restait plus qu'à l'écrire…
Quelques nuits blanches plus tard je voyais sortir les pages de mon livre de la presse numérique, prêtes à être encollées.

 

— Quelle question aimerais-tu que je te pose et quelle réponse y donnerais-tu ?

La question serait : Quels conseils donnerais-tu aux personnes qui aimeraient commencer la photographie ?

Et la réponse... Ce que je pourrais vous dire dans un premier temps c'est : Foncez ! Faites plein de photos ! Ce n'est pas qu'en faisant des écoles de photo qu'on devient photographe, c'est surtout en faisant des photos. Si vous avez du mal avec la technique, que vous ne comprenez pas comment ça fonctionne, lisez le manuel de votre appareil photo, je vous jure que c'est d'une grande aide. Et c'est indispensable de bien connaître son matériel. Entrainez vous, vous avez de la chance (tout comme moi), avec le numérique l'apprentissage de la photo c'est beaucoup plus simple et rapide, on voit le résultat tout de suite et on peut faire plein de tests. Dès le début, utilisez le mode manuel de votre appareil, oubliez tous ces modes automatiques ! Plus vous contrôlerez votre appareil, plus vos photos seront de qualité. Ensuite, un peu plus tard, investissez dans du bon matériel, ne lésinez pas sur le prix. En photo, entre un objectif à 1000€ et un à 200€, je vous assure qu'il y a une différence de qualité qui justifie le prix. N'achetez pas de marques exotiques, restez sur les standards, cela permet d'avoir une large gamme de choix. Je ne vous l'ai pas encore dit mais la photo c'est presque un truc de riche !

Autre alternative, la photo argentique. C'est peut-être plus contraignant, mais c'est pas cher du tout et ça permet de se forcer à la réflexion avant de faire des photos. Très bien pour la suite de l'apprentissage. Avec la photo argentique, il y a aussi le rapport qu'on a à l'image, la matérialisation de l'image photo que l'on perd en numérique. En argentique, elle est présente physiquement et il faut en prendre soin.

Bref une fois que vous savez utiliser un appareil, vous allez pouvoir commencer à utiliser votre appareil photo comme un outil, un outil qui va vous permettre de faire passer votre message. Et pour moi c'est le plus important, sans message, une photo n'a que très peu d'intérêt… Une fois que vous avez compris ça, vous aurez découvert la photo !

© Luka Leroy

© Luka Leroy

 

 


 

Contact :

www.lukaleroy.com

 

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2 commentaires sur “Resistenza Moves : L’Islande en vélo et en argentique

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