SupoCaos en interview

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Interview

 

— Pour que nos lecteurs te situent mieux toi et ton univers, quel est ton « milieu » culturel, le jus artistique où tu baignes ?

Salut les gens, je suis artiste peintre graffiti et président du collectif La Ruche à Nîmes. Pour ma part, j'ai toujours fait des décos sur Nîmes dans différents milieux, hiphop, free party, rock, circassien... ce qui m'a permis de connaitre tout le milieu culturel alternatif. Il y a 3 ans grâce à tout ce réseau, on a pensé à prendre des ateliers, on a trouvé La Ruche, un ancien théâtre derrière la gare. Nous étions une petite dizaine, des graffeurs, des organisateurs de soirées techno, photographe, mécano, menuisier… Un milieu éclectique, plutôt « hip-hop-electro » quand même, du coup, beaucoup de rap de graffs et de sons, un bon mélange explosif qui nous a amené à travailler tous ensemble… Beaucoup de brassages dus aux différences des individus et un  espoir pour la ville, vu qu'il n'y avait rien…
Cette énergie débordante a permis de créer d'autres événements et lieux culturels, tel que l'Expo de Ouf et le Spot qui ont permis d’asseoir un peu plus notre culture.
Donc, j'ai passé ces dernières années à me battre pour développer notre mouvement, à croire qu'on peut encore vivre ensemble et échanger.

 

— Comment en es-tu arrivé à la bombe de peinture, et depuis combien de temps la manies-tu ?

J'ai commencé à peindre en 97, à la campagne, en mode autodidacte. Je faisais déjà des trucs bizarres, le graffiti me plaisait mais je ne comprenais pas pourquoi il n'y avait que des lettres en vandale... Je mélangeais donc des persos avec des lettres en essayant de toujours foutre un petit message dans mes dessins, ou parfois, j'étais à la limite de l'abstraction ou des formes géométriques. En 2000, je suis arrivé à Nimes pour faire une Fac' d'Arts Plastiques... J'ai rencontré d'autres graffeurs et artistes en devenir.
Tout ça m'a permis de développer mon univers. J'ai appris un peu plus les codes du graff mais aussi de l'art contempourien.
À force de trainer dans ces milieux conceptuels, mon travail a pris aussi une tournure street-art : détournement, utilisation de l'espace ; c’était pas encore à la mode... et les graffeurs étaient sceptiques je pense. Du coup, j'ai toujours un peu été à part du mouvement originel, puriste.
Mon parcours m'a fait passé par Toulouse et Lyon, où j'ai encore appris plein de choses. J'ai eu des crews mais pas sérieux, la plupart ont arrêté... mais toutes ces rencontres ont nourri mon envie de continuer. En 2009, je reviens sur Nimes. Le graffiti se porte bien, la scène est petite mais dynamique, ce qui me permet encore de partager.
C’est en 2012 que j'ai rencontré Isaac, un artiste graffeur du Pérou, on s'est rencontré à la Ciotat, lors d'une jam. Une belle rencontre qui me permet de voir la peinture de manière internationale. De plus, j'ai trouvé chez les DMJC, ce plaisir de l'utilisation des couleurs et des sens. L'Amérique Latine est emprunte d'une histoire liée à d'anciennes civilisations, qui lui confère un style bien particulier, coloré, symbolique et parfois mystique.
Je suis également dans d'autres crews plus vandales : 1D, QTK ou bien les fresqueurs fous, A2051.

 

— Comment tu définirais ton style «super coloré» ?

Dans les années 2000, une nouvelle génération de graffeurs dont je fais parti avait développé, un style graffiti plus torturé, plus dark, venant d'une part clasher le graffiti traditionnel que les puristes affectionnent et d'autre part marquant l'avènement d'une autre culture, celle de la free party.
Je fais parti de cette génération qui casse les codes des graffs, des contours dégueulasses, beaucoup de mouvement, des remplissages sombres, déstructuration de la 3D et la nature comme source d'inspiration.
En 2005, après une époque un peu sombre, l'esthétique change de nouveau, la couleur revient plus que jamais. Et je crois que j'en ai eu bien besoin aussi...
Je trouve mon équilibre entre style sauvage, saturé, prolifique et couleurs vives, fluos et lumières.
Les couleurs sont devenues, au fil du temps, un moyen pour moi d'exprimer des histoires, des symboles.

 

— Les artistes qui t'ont inspiré ?

Je vais rester très graffiti, mais de nombreux contemporains sont très doués, en mode street-art, détournement, JACE est vraiment bon, pour une vision plus artistique, les DMV, qui ont su créer une belle identité et les GF pour le graff... Sinon, dans un style plus coloré, les Brésiliens Os gemeos me régalent.

 

— Ta vision de la culture dans notre plus si « douce France » ?

La culture en France c'est un peu le drame, elle est étouffée par la tradition et son histoire... et son business. Une ville comme Nîmes vise sur ses arènes pour toucher un tourisme mondial, mais sacrifie sa jeunesse au détriment de car de vieux croulants... ou lui donne l'occasion de se mettre minable lors de grandes beuveries telles que la féria.
Cependant, le pays est riche et les alternatives sont possibles, nombreux sont les résistants, l'initiative est la seule solution, rien n'arrive tout cuit. Et c'est en se réappropriant la ville que l'on pourra affirmer et intégrer notre culture.

 

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