Malcolm X : Le Pouvoir Noir
Historique :
C'est le 19 mai 1924 que Mme Little accouchait d'un petit garçon appelé Malcolm. Le père de Mme Little était blanc et elle même aurait pu passer pour une blanche. Malcolm avait le teint clair ce qui aurait le don de l'agacer. Il avait quatre ans lorsque le Ku Klux Klan mit le feu à la maison familiale, et cinq ans quand son père (Earl Little) mourut d'un accident de circulation, tout du moins d'après la police car la famille parle d'un meurtre camouflé.
Pendant toute sa jeunesse il eut l'espoir d'être un noir accepté des blancs. Mais son adolescence lui révélera qu'il était illusoire de le penser. Il est quasiment impossible, en ces temps, au États-Unis, d'échapper au système de ségrégation et de discrimination raciale.
A vingt ans il consomme quotidiennement de la cocaïne, ce qui l'obligera à trouver de nouvelles ressources financières, et lui vaudra d'être condamné à dix ans de prison suite à un cambriolage.
C'est dans cet univers carcéral, dénué de sens, que sa destinée prendra forme.
Malcolm va se rapprocher de l'Islam par le biais d'un prédicateur appelé « Elijah Muhammed », directeur des black muslims. Ce groupe radical réclamait notamment la création d'un état noir en incitant les Afro-Américains à la révolte tout en diabolisant l'homme blanc, qu'ils appelaient les « white devils ». Malcolm Little deviendra à sa sortie de prison un haut responsable de l'organisation et s'affranchira de son nom d'esclave (Little) pour le remplacer par la lettre X, symbole pour les musulmans de l'authentique nom de famille africain qu'ils ne peuvent connaître.
Malcolm X est en marche.
Le positionnement idéologique des Blacks Muslims était en rupture totale avec les différents leaders des mouvements chrétiens de l'époque. Ils ne se privaient pas de le répéter régulièrement dans leurs congrès. Le pasteur Marthin Luther King qui prônait l'intégration, l'égalité des droits civiques et la non violence, en faisait partie. Cette séparation concernait les solutions et les actions à entreprendre contre le système en place, mais était également un problème d'ordre religieux :
Extrait :
« Le nègre est entré en contact avec le christianisme comme esclave ; au contraire, il est entré en contact avec l'islam en tant qu'homme. »
L'organisation d'Elijah Muhammed revendique le pouvoir pour les noirs par les noirs, plus connue sous le nom de « Black Power ».
Des années plus tard Malcolm X quittera les Black Muslims car il trouvait ce mouvement trop sectaire et pas assez actif. Il créera donc en 1964 une organisation capable de rassembler beaucoup plus d'adeptes dans un groupement non religieux appelé l'O.A.A.U (Organisation de l'Unité Afro-Américaine).
Cette dernière année avant sa mort sera cruciale dans l'évolution de ses idées et de ses préjugés. Ses discours et ses prises de position sont là pour nous le rappeler.
Le 21 février 1965 Malcolm X est assassiné lors d'une conférence, par trois noirs, dont deux font partie des Black Muslims.
Ce livre s’appuie sur les discours publics et les lettres de Malcolm. En s'intéressant longuement sur la période suivant sa séparation des Black Muslims.
Ses idéaux politiques évoluent constamment lors de l'année 1964. Il incitera sa communauté à se révolter et à rompre la léthargie ambiante qui ronge les siens.
Extrait :
« Lorsque les nôtres sont mordus par des chiens, ils sont en droit d'abattre ces chiens. Nous devons être pacifiques et respecter les lois mais le moment est venu, pour le noir américain, de recourir à l'auto-défense chaque fois qu'il est victime d'une agression injuste et illégale. Si le gouvernement pense que j'ai tort de dire cela, que le gouvernement se mette à faire son travail. »
« Je suis non-violent à l'égard de ceux qui pratiquent la non-violence à mon égard. »
Puis Malcolm eut une idée, transformer la lutte des droits civiques en lutte pour les droits de l'homme. Cette internationalisation de la lutte lui permit de mettre en accusation le gouvernement américain devant l'ONU pour racisme. Son but est également d'alerter la communauté internationale afin d'exercer une pression politique sur les États Unis.
Extrait :
« Nous luttons pour être reconnus en tant qu'êtres humains. Nous luttons pour avoir le droit de vivre en hommes libres dans cette société. En vérité, nous luttons aujourd'hui pour des droits plus importants encore que les droits civiques, nous luttons pour les droits de l'homme... »
« On viole les droits humains des noirs, dans un pays qui se prétend chargé de la direction morale du monde libre. »
(C'est bien connu, la morale c'est toujours bon pour les autres)
Pour défendre cette nouvelle position et pour rallier des pays noirs à sa cause, il entreprend plusieurs séjours sur le continent africain.
Suite à un lobbying bien orchestré il se fera même inviter à une conférence d'états africains, en qualité de représentant des 22 millions d'afro-américains. Cette ouverture sur ce continent fera évoluer ses analyses sur l'homme blanc qu'il condamne sans relâche depuis des années.
L'influence du monde musulman notamment fera exploser ses conceptions antérieures. Il évoquera lui-même une renaissance spirituelle et se refusera à l'avenir de condamner en bloc tout une race.
Extrait :
« A l'avenir, j'entends veiller à ne pas condamner un homme tant que sa culpabilité ne sera pas établie. Je ne suis pas un raciste et je ne souscris à aucun des dogmes du racisme. »
Ce revirement dans sa pensée prouve les qualités intrinsèques importantes de cet homme, son ouverture d'esprit et son sens critique sont des exemples à suivre.
Il gardera néanmoins face à l'oppression une détermination sans faille et adoptera une attitude d'opposition militante. D'autres discours de Malcolm X nous éclairent sur sa vision du capitalisme :
« Montrez moi le capitaliste, je vous montrerai le vautour... »
Il évoque le socialisme, découvert au grès de ses voyages, et s'en inspirera lors de ses dernières allocutions publiques. Beaucoup d'autres sujets sont abordés dans ce livre qui est une mine d'informations sur la condition des noirs, et sur la résistance mise en place contre ce système fasciste bien élaboré, qu'on appelle démocratie.
par Philippe Vieilleden