See Real – Arcane 13

Temps de lecture: 8 min

 

 

 

Arcane 13

 

 

 

"Nothing is Eternal" © Isthmael Baudry

 

 

Murmures sanglants. Des murmures suintants à contre vent. Hurlants. Écoute. Écoute bien. Ça crépite. Ça serpente. Skanks mineurs. Une horde jaillit. Les rideaux s'enflamment. Infra-basses telluriques. Fatales. Montée et voix subliminales. Tu es seul, toi seule, et nous seuls. Echo request. Echo request. Test final. Identifiant abandonné. Assis. Grand brûlé. Au milieu de l'attente interstellaire. Murmures virulents. Voix dans la tête. Les Plaques de Pioneer dans le vide intersidéral. Retourne-toi, on chuchote derrière, quelque part. Des sons. Des murmures dans les vents coulis. Ça  serpente.  Regarde ici ça crépite. Regarde derrière toi, sur les côtés. Les flammes. Tu vois quelqu'un mis à part des silhouettes en train de cramer, des ombres sans têtes, tu vois réellement quelqu'un ? Tu te sens réellement deux, ou vraiment seul ?
La porte. Elle vient de rentrer. Syntonisation décalée.

 

Susurre entre les persiennes, murmures nyctalopes, les rythmes s'entrechoquent : tu es seul. Nous sommes seuls. Des glaçons au fond d'un verre. Seul, seule, seuls. Le reste ; les alliances, les bijoux, les contrats, les salaires, les achats, les ventes, tout le reste, tout ce qui reste entre vous et nous, tu sais exactement ce que c'est. Du Fair Use. Du vide Delta. Du lustrage hypnagogique. Game Over. Les murmures-incendies dans les stries des contrevents, tu es seul, toi seule et nous, seuls. Ça serpente. L'insidieux incendie.
Nos pitchs décalés. Ce que tu tentes d'oublier. Du feu sur le gaz. Ton synderme se liquéfie.

→ Image, imagine un sens. Des principes. Des murmures. Le troupeau en mode Rayban®. Les limites toutes fraîches d'une vie, ne pas toucher, les boîtes de conserves, les voitures, les canapés, les télés, toutes les machines et les robots. Les codes. Le mode d'emploi qui précise : la résistance au feu est la durée minimale durant laquelle un élément de construction doit remplir les exigences définies.
Imagine. Marche. Entreprend. Planifie l'implanifiable. Planète nausée. Fixé. Programmé. Guidé par satellite. Et seule la vitesse de la propagation te capture, extralucide, te murmure, écoute, écoute bien, ça crépite, ça flambe. Skanks tranchants. Ça serpente. Une meute rugit. Des cris dans la  nuit.
Cosmic connexion failed. On ne parle plus. Pourtant tout bouge autour. Se déchire. Se dilate. Se dissout.

Murmures en dessous. Le canon froid dans la bouche. Détonation sourde. Des murmures à contre vent. Écoute, elle serpente, la horde sérotonine. L'envie d'ailleurs, sauvage. Un autre slogan. Une autre identité dans un autre monde. Rejoignez-nous, pour toute information :

Murmures dans les contrevents, en feu. Je suis là, la voix qui souffle : tu es seul, elle seule et vous seuls. Tu en es là. Je t'entends lire. Je te vois respirer. Suffoquer. Écrire. Break de batterie. Écrire break de batterie. Boucle-murmure, regarde derrière toi, sur les côtés : tu vois quelqu'un, mis à part des silhouettes tortueuses, des ombres à capuches enflammées, tu vois réellement quelqu'un ? Tu te sens réellement deux, ou vraiment seul ?
Je ne l'entends pas. Elle  doit faire quelque chose quelque part. Synapses mouvantes.

Ralenti synoptique, cénesthésie négative. Une cicatrice court sous mes doigts le long de ton bassin. Je me rappelle les premiers jours, brèche atemporelle. Mais qu'en reste-t-il Mélusine ?
De la pluie sur les boulevards. Wobbles acides. Des projections. Des charniers. Poussières, amas et gravats morts-nés. Ici, dans ces silences désincarnés. Reptiliens. Projections cannibales. Embryons décharnés. Insomnies rémanentes. L'ascenseur pour faux-fuyants. Infra-basses telluriques. L'envie d'ailleurs. White Widow®. L'envie d'ailleurs. D'une autre marque.
J'entends des pas. Elle doit faire quelque chose quelque part. Nexus transmutant.

Pas envie. Rien. Je rêve en regardant des sites, des photos de site de voyages sur le net. Les belles photos qu'un, tu sais, un connard t'envoie quelquefois en .pps sur ta boîte mail. Les palmiers. La mer. Le sable. Le soleil. Et tout ce genre de trucs. Toutes les destinations de vos rêves.
J'imagine acheter une de ces cartes postales, un pack complet, le Package total®, de l'apéro sur la plage au petit flirt discret avant d'aller en boîte jusqu'au petit déjeuner re-sur la plage. J'imagine que j'ai assez de fric pour faire ça et, j'imagine que ça me plairait bien.
Comme le suicide synchrone du cerveau. Court-circuit dans le sous-réseau interne. L'annihilation lente et progressive, le cortex grésille, les connections se grippent, les transmetteurs dévient, lent dérèglement raclant la réalité comme une basse grasse dubstep. Ce soir. La pyrolyse globale. J'entends des bruits dans la cuisine.

 

Dehors, les gyrophares samplés. La carte postale venait de s'effacer. Comme elle était venue. Zappe. Change. Circule. Rythme. Des alarmes en boucle. Switch. Arcanes et cœurs stoppés. La ligne discontinue dans les phares noir et blanc. Jeu en ligne. Tire et oublie. Break. Presque le silence. Le silence d'avant la bombe. Le plafond s'élève. Le rouge exothermique du tapis accroché au mur. L'oscillateur énerve, tord, serre les dents et fait rebondir la basse. Le réel. L'envie d'ailleurs. Comme une hallucinose.

 

Mélusine me regarde et me dit soudain :
« - Tu veux un peu de mescaline avant que je t’émascule car nous sommes samedi. Et samedi, non, ce n’est pas raviolis. Non, aujourd'hui, c’est serpent, ou spaghettis si tu préfères, fais-moi confiance, je vais déjà faire bouillir l’eau. Hé ! Mais viens, approche-toi ! Je vais aussi ajouter un bouillon de poule -  de poule ça devrait te plaire ! Viens! Je te dis V-I-E-N-S, ça ne te fera pas mal. Tu peux me  faire confiance. Regarde, c'est écrit : une fois en main, plonger-la et attendre six, voire sept minutes. Approche-toi ! BON ALLEZ, VIIIIIEEEEENS ! VA PAS FALLOIR QUE JE VIENNE TE CHERCHER QUAND MEME ! Merde, ce que tu fais chier...Allez, je suis ta bonne fée et je te donne des produits en plus, ta bonne beuh là... Allez, illico ! Viens que je t’émascule mon petit serpentounet, viens voir maman ! Oh, qu’est ce que tu as aujourd’hui ? T’as peur qu’il ne t’en reste plus pour toutes tes petites pétasses d’étudiantes ? »

 

Synapses altérées. Fenêtre instable. L'envie d'ailleurs. Premium quality. Skanks mineurs. La lune sous analogic delay. Je rêve d'éloigné. Au-delà des torchères.
Mélusine siffle :
« - Tu envenimes tout ce que tu touches, serpent de malheur. Je voudrais te scalper pour tu comprennes quel effet ça fait. Quel effet ça fait, par-faite-ment. QUOI ? DE QUEL EFFET JE PARLE ? Tu te fous de ma gueule franchement,  p'tit merdeux ! Je t'emmerde. RESTE ASSIS ! Et alors écoute, puisque tu veux réécouter ton histoire merdique petit moussaillon de mes deux. Écoute maintenant et cesse de gémir. Mais t'inquiète, ça va pas durer longtemps. C'est l'histoire d'un type qui a tout mais qui gâche tout. C'est l'histoire d'un type qui trompe sa nana parce que le pauvre, tu comprends ? Il peut pas résister... Ça, c'est ton histoire. Mais tu n'imagines pas, enfin j'ai vraiment l'impression que tu n'imagines pas ce que ça génère. C'est ton histoire. Mais on vit ensemble. Là, tu devrais me dire quelque chose mais tu le diras pas alors je continue, je te connais bien hein !, donc... et MOI là-dedans ? Je n'existe pas, M-O-I, JA-MAIS ! Jamais pour toi en tout cas. Heureusement que je te grille tout le temps. Enfin heureusement, oui je suis fixé, donc oui heureusement. Enfin il y a longtemps que je suis fixée finalement. J'AI ENVIE DE T'ETRANGLER ! Bref, c'est l'histoire d'un loser. Un vrai de vrai. Parce qu'il le vaut bien®. Un loser qui rêve d'ailleurs. Mais tu pourras pas échapper à toi-même. C'est pas comme ça qu'on s'échappe. Non. C'est par une petite découpe de toi. Une incision. Un bout en moins. Allez, viens, je t'attends. Tu seras bientôt libéré. »

Nœud flottant. Black mamba à deux pattes. De la pluie sur les boulevards. Acides. Et des projections. Ici, dans ces pulsations aux pitchs désynchronisés. Désyntonisés.
Tu en as déjà trop fait, Mélusine.

Murmures. Quand j'ai pris de l'ayahuasca la première fois, je me suis transformé en cafard. Il a fallu que le shaman touche mes antennes pour que je le comprenne. Comme une renaissance.

Murmures à contre vent. Les lames sifflent. Tu en as déjà trop fait, Mélusine. L'illusion dans laquelle nous, tue. Nuit gravement à la santé. Il pleut sans arrêt. La date de péremption nous a condamnés entre les murs déformés. Seul, seule, seuls. Deux croches noires, générique de fin.  Arcane 13. Des sirènes tordent le soir électrique.

Murmures sanglants. Des murmures suintants à contre vent. Hurlants. Écoute : Mélusine se marre. Allumettes. Elle ne croit pas que. Elle ne croit pas que je. Craque. Soufre. Étincelle. Crépite. Dans le ziploc, sa main fouille pour trouver le bon cachet, du 2C-B. Nerveuse. Elle relève soudain la tête et ses longs cheveux filandreux.

Souvenirs de demain, rêves d'ailleurs. Murmures à contre vent. Un autre temps. Une autre histoire. D'autres nuages. D'autres langues. Écoute. Écoute bien : ça serpente. Ça crépite. L'inéluctable. L'entropique. La dernière image.
Zoom : elle me regarde, les yeux écarquillés, et me dit :
« - Mais qu'est-ce que c'est ? Qu'est-ce que t'as encore fait ? Qu'est-ce que t'as allumé ?
   - Un feu de forêt, un feu de braises. Un volcan, chérie... »

 

 

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